Bloc de l’Est
Bloc de l’Est
Dans les années 60, la Roumanie et l’Albanie ont pris une relative autonomie, tandis que la Yougoslavie qui en avait initialement fait partie compte au rang des pays non-alignés
Création Fin de la Seconde guerre mondiale (1945-1947)
Dissolution Effondrement du communisme en Europe et en URSS (1989-1991)
Type Alliance politique, économique et militaire
Langue(s) Russe,polonais, allemand,tchèque, slovaque, hongrois, roumain, bulgare, albanais
Membre(s) URSS
République populaire de Bulgarie
République socialiste de Roumanie
République populaire de Hongrie
République démocratique allemande
République populaire de Pologne
République populaire socialiste d’Albanie
République socialiste tchécoslovaque
République fédérative socialiste de Yougoslavie
L’expression bloc de l’Est désigne l’ensemble des régimes communistes qui s’instaurèrent après la Seconde Guerre mondiale dans les pays d’Europe situés à l’est du Rideau de fer, placés sous le contrôle plus ou moins direct de l’Union soviétique. D’autres désignations furent aussi utilisées, les plus courantes étant pays de l’Est ou pays satellites de l’URSS, mais aussi bloc communiste ou bloc soviétique.
Cet article n’aborde pas l’histoire des autres pays communistes d’Asie ou du reste du monde1, qui pendant la Guerre froide furent le plus souvent appelés le bloc communiste ou parfois aussi le bloc de l’Est par extension. Ces pays ne constituèrent en réalité pas un bloc car notamment à partir de la rupture sino-soviétique ils conduisirent leur propre politique qui les amena parfois à s’opposer vivement à l’Union soviétique.
Ces pays d’Europe ayant appartenu au bloc de l’Est sont l’Albanie, l’Allemagne de l’Est (ou RDA), la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie. Parmi eux, la Yougoslavie de Tito resta dès l’origine à l’écart de la tutelle soviétique et joua un rôle majeur au sein du mouvement des non-alignés. L’Albanie et la Roumanie, acquirent dans les années 1960 une certaine autonomie vis à vis de l’URSS.
Entre 1945 et 1949, dans tous ces pays le parti communiste prit le pouvoir, s’érigea en parti unique et mit en place un régime se réclamant du communisme, sous l’appellation de République populaire, socialiste ou démocratique, calqué sur celui de l’Union Soviétique. Pendant les quarante années qui suivirent, ces pays connurent un réel développement économique et des succès, parfois spectaculaires comme en sport, dont les partis de gauche en Europe de l’Ouest se firent largement l’écho. Ils ne répondirent pas en revanche aux attentes de leurs populations privées de liberté et dont le niveau de vie resta très inférieur à celui de l’Ouest. La plupart de ces pays ont été secoués par des crises violentes qui par deux fois ont entrainé l’intervention militaire de l’URSS, en Hongrie (1956) et en Tchécoslovaquie (1968). L’effondrement du bloc de l’Est se produisit, de manière inattendue pour la plupart des observateurs étrangers, sur une période très courte centrée sur l’année 1989 et pratiquement sans effusion de sang. La disparition de l’URSS en 1991 clôtura cette période de l’histoire de ces pays d’Europe de l’Est.
Histoire diplomatique et politique du Bloc de l’Est
Formation du Bloc de l’Est (1944-1948)
Le passage de l’alliance entre les États-Unis, l’Union Soviétique et la Grande-Bretagne pour vaincre le régime nazi en Allemagne à l’instauration de la guerre froide opposant les démocraties occidentales aux régimes communistes s’est opéré en moins de deux ans. Les évènements décisifs consacrant ce divorce se sont déroulés en Europe, et dans une moindre mesure au Moyen-Orient en en Asie.
Les prémices : le pacte germano-soviétique d’août 1939[modifier]
Ce pacte 2 permit à Staline de reprendre la quasi-totalité des territoires aux marches occidentales de l’empire russe perdus depuis la chute du tsarisme. Il annexa ainsi les trois États baltes, (Estonie,Lettonie et Lituanie) ainsi que des régions devenues polonaises à l’ouest de l’Ukraine et de la Biélorussie, selon un tracé adapté de celui de la Ligne Curzon.
Accords passés entre les Alliés concernant l’avenir de l’Europe de l’Est
Dès la conférence interalliée de Téhéran en 1943, les Alliés commencèrent à examiner le futur de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale3. À Moscou en octobre 1944, Churchill et Staline se mirent d’accord sur un partage d’influence dans les Balkans. Lors de la conférence de Yalta en février 1945, Staline exprima sa volonté d’établir une sphère d’influence soviétique en Europe de l’Est, mais accepta que l’Allemagne ne soit pas démembrée. Concernant la Pologne, il indiqua vouloir garder la partie orientale annexée au titre du pacte germano-soviétique et instaurer un gouvernement pro-soviétique dans ce qui constituerait un nouvel État polonais. Il promit en retour un élargissement sur une base plus démocratique du Comité polonais de libération nationale, ainsi que l’organisation d’élections. Les Alliés se mirent aussi d’accord pour que soient créées des institutions démocratiques de leur choix dans les anciens satellites de l’Allemagne nazie et que des élections y soient organisées. Ces dispositions furent réitérées à Potsdam après la reddition de l’Allemagne, et complétées par un accord sur les réparations de guerre qui revêtaient une importance particulière pour l’URSS, dont l’économie était exsangue au sortir de la guerre.
L’occupation de tous les pays d’Europe de l’Est et de la partie orientale de l’Allemagne par les armées soviétiques a d’entrée de jeu délimité la frontière entre ce qui allait devenir les blocs de l’Ouest et de l’Est. Entre les pays d’Europe de l’Est, des modifications de frontières importantes vont intervenir se traduisant notamment par une extension vers l’Ouest de l’Union soviétique. Elles seront rapidement entérinées par les traités de paix qui seront signés en 1947 pour tous ces pays, sauf l’Allemagne et l’Autriche qui demeureront sous régime d’occupation par les Alliés pendant encore plusieurs années.
À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les territoires en gris sont transférés de la Pologne à l’URSS, et ceux en rose de l’Allemagne à la Pologne.
Les objectifs sécuritaires et économiques de Staline à la fin de la Seconde Guerre mondiale
Staline en réalité poursuit des objectifs très précis vis-à-vis de l’Europe de l’Est : il veut avant tout mettre en place un glacis qui protège l’URSS de tout risque de tentative de renversement du régime communiste par les Occidentaux. Il veut à tout prix éviter de se retrouver dans la situation de l’URSS des années 1920 qui a dû lutter pour sa survie. Vu de l’URSS, en effet, le pays est encerclé par des pays hostiles. Il n’a aussi pas d’accès à la mer à hauteur de ses ambitions, d’où les tentatives en Iran, en Turquie et en Grèce d’instaurer un régime communiste ou de négocier des garanties de circulation de la marine soviétique. Les réactions fortes des États-Unis et de la Grande-Bretagne feront échouer ces tentatives.
Staline avait confié à Tito en avril 1945 que « cette guerre ne ressemble pas à celles du passé : quiconque occupe un territoire lui impose aussi son système social. Tout le monde impose son propre système aussi loin que son armée peut avancer. Il ne saurait en être autrement » 4. La promotion de la révolution socialiste mondiale était en fait moins prioritaire que l’établissement d’une zone d’influence garantissant la sécurité de l’URSS, notamment dans la mesure où Staline était convaincu que les contradictions et affrontements internes au monde capitalisme suffiraient à l’ébranler en profondeur. Les documents rédigés par Maxime Litvinov et Ivan Maisky qui expriment les vues du Ministère Soviétique des Affaires Etrangères fin 1944 et début 1945 parlent très clairement de l’établissement de zones d’influence soviétiques et anglaises et d’une zone neutre comprenant notamment l’Allemagne mais ne laissent pas augurer de la constitution d’un bloc composé de pays totalement inféodés à l’URSS 5.
La supériorité énorme de l’armée soviétique en Europe rendait possible sans risque majeur de pousser une politique active de prise de contrôle de l’Europe de l’Est continentale. En parallèle, Staline fit accélérer très fortement le développement de l’arme nucléaire afin de briser le monopole des États-Unis en la matière.
La forte attractivité du communisme dans des pays dévastés par la guerre[modifier]
Le communisme apporte à la fin de la guerre la réponse la plus construite à l’immense espoir de changement des peuples d’Europe et auvide politique et administratif laissé par des années de nazisme et de guerre6. Les responsables communistes martèlent que leur objectif n’est pas de transposer dans leur pays le modèle soviétique mais d’inventer un socialisme s’inscrivant dans les aspirations nationalistes légitimes.
Dans la plupart des pays, le nombre de membres du parti communiste explose.
Les politiques menées souvent dans les mois qui suivent la fin de la guerre répondent à des aspirations de justice et de relèvement économique du plus grand nombre, qu’il s’agisse des nationalisations ou des réformes agraires. Elles ne sont pas perçues comme un premier pas vers la soviétisation.
La prise de pouvoir sauvegardant plus ou moins les apparences de la démocratie
Selon les accords passés entre les Alliés, un processus démocratique devait permettre à chaque peuple de décider librement le régime politique qu’il souhaitait dans chacun des pays dont la souveraineté vient d’être restaurée. En pratique, l’URSS soutient massivement les communistes de l’Europe de l’Est qui appliquent la stratégie du Cheval de Troie et du salami (noyautage de l’administration, élimination des adversaires un à un en menant des campagnes de provocation ou de diffamation, fraude électorale)7,8.
La question qui se posait à Moscou était comment passer de l’occupation militaire de ces pays à leur contrôle complet une fois leur souveraineté restaurée. À la fin de la guerre, la dissimulation du rôle du Kremlin était cruciale pour que les régimes qui se mettaient en place apparaissent autonomes et ressemblent le plus possible àceux des démocraties occidentales. Comme les communistes consituaient une minorité dans tous ces pays, leurs partisans eurent instruction de former des coalitions avec les autres partis.
Le processus de prise de pouvoir par les communistes pro-soviétiques suivit en gros partout le même processus en plusieurs étapes:
installation d’une coalition de centre-gauche, rassemblant les forces anti-fascistes;
accroissement du rôle des membres du Parti Communiste au sein de la coalition et neutralisation progressive de ceux des autres partis qui refuseraient la suprématie communiste;
domination complète des communistes, fréquemment réalisée par fusion de plusieurs partis de gauche;
organisation d’élections sous contrôle communiste afin de légaliser la prise de pouvoir;
élaboration d’une constitution sur le modèle de celle de 1936 de l’Union Soviétique.
Ce processus a été largement facilité d’une part par la disparition des anciennes élites d’avant-guerre et d’autre part par le prestige considérable des mouvements de partisans le plus souvent de gauche ou d’extrême gauche qui jouèrent un rôle clé dans la lutte contre le fascisme et le nazisme. L’énorme prix humain et matériel payé par l’Union Soviétique pour la libération de ces pays leur donnait aussi une certaine légitimité à peser fortement sur leurs orientations politiques futures.
Dans la zone d’occupation soviétique de l’Allemagne de l’Est, pourtant entièrement contrôlée au plan militaire comme politique, la question se posait en des termes très différents : il n’était à court terme pas question de la transformer en un état satellite, puisque officiellement l’Union Soviétique prônait l’unité allemande 9.
Si les similitudes sont grandes sur la manière dont Staline imposa sa loi dans les sept pays de l’est, on peut distinguer cependant trois situations bien différentes :
L’Albanie et la Yougoslavie, où les communistes, principaux acteurs de la libération de leur pays, prirent immédiatement le pouvoir,
Les autres pays des Balkans, la Bulgarie et la Roumanie, où les accords entre Alliés laissèrent les mains libres aux communistes qui prirent rapidement le pouvoir,
Les pays d’Europe du Centre, la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hongrie où l’attention portée par l’Ouest à leur devenir politique contraignit les Soviétiques à agir avec prudence et à bien plus longtemps sauvegarder les apparences de la démocratie.
Albanie et Yougoslavie
En Albanie et en Yougoslavie, ce sont les partisans communistes qui ont libéré leur pays, pratiquement sans l’aide de l’URSS. Ils se trouvèrent donc tout naturellement en position de prendre le pouvoir dans la foulée sans passer par une phase de partage et de conquête progressive du pouvoir. Dès octobre 1944, avant même la libération totale du pays, Enver Hoxha prend la tête d’un gouvernement provisoire dont le Parti Communiste détient la plupart des portefeuilles. En Yougoslavie, Tito prend la tête d’un gouvernement provisoire de coalition en novembre 1944. Le 29 novembre 1945, l’Assemblée constituante abolit la monarchie et proclame officiellement la République fédérative populaire de Yougoslavie (RFPY) dont la constitution élaborée elle aussi sur le modèle soviétique sera publiée le 31 janvier 1946. Dès le départ, les conditions pour que la Yougoslavie s’émancipe du Bloc de l’Est étaient réunies.
Bulgarie et Roumanie
La Bulgarie et la Roumanie constituent un deuxième cas de figure : monarchies avant la guerre, pays alliés de l’Allemagne Nazi pendant celle-ci, leur statut d’ennemi et leur faible intérêt stratégique pour l’Ouest en faisaient un terrain de jeu facile pour les communistes qui n’eurent pas vraiment besoin de masquer longtemps leurs intentions. Leur appartenance à la zone d’influence soviétique avait été reconnue au cours de la conférence qui s’ouvrit à Moscou le 9 octobre 1944 entre Staline et Churchill, au cours de laquelle fut admis un partage 75/25 % en Bulgarie et 90/10 % en Roumanie en faveur dans les deux cas de la Russie. En échange, la Grèce resta dans la zone d’influence britannique. L’absence de soutien de la Grande-Bretagne et des États-Unis aux mouvements non communistes de libération ou aux gouvernements en exil laissa la porte grande ouverte aux communistes qui formèrent dans ces deux pays un gouvernement provisoire dont ils occupaient les premiers rôles dès avant la fin de la guerre en Europe. Il n’y eu non plus pas d’élection libre et la monarchie y fut remplacée par un régime de type soviétique dès avant la fin de 1945.
Pologne, Tchécoslovaquie et Hongrie
La situation était tout autre dans les trois autres pays, la Hongrie, la Pologne et la Tchécoslovaquie, historiquement beaucoup plus développés et proches de leurs voisins d’Europe de l’Ouest mais dont la position géographique stratégique eu égard au dessein stalinien de se constituer un glacis et la richesse potentielle rendaient totalement indispensable de s’en assurer in fine le contrôle. Mais il était nécessaire pour ne pas risquer un affrontement avec l’Ouest et essayer de régler la question allemande à l’avantage des soviétiques de procéder pas à pas.
Pologne
En Pologne, un premier Gouvernement Provisoire de la République de Pologne entièrement dominé par les communistes est formé le 1er janvier 1945 par auto-proclamation du Comité polonais de libération nationale, aussi appelé Comité de Lublin, créé par les communistes polonais pro-soviétiques. Mais les anglais et les américains mettent en demeure les russes lors de la conférence de Yalta de février 1945 12d’ouvrir ce gouvernement à des non communistes. Lui succède donc le Gouvernement Provisoire d’Unité Nationale formé le 28 juin 1945 d’une coalition des principaux partis:
le Parti socialiste polonais (PPS) dont est issu Edward Osóbka-Morawski, qui devient premier ministre,
le Parti ouvrier polonais (PPR) communiste dirigé par Władysław Gomułka, qui est nommé vice-premier ministre,
et le Parti du Peuple Polonais (PSL) de centre-droit et représentant traditionnel des paysans, dont son leader Stanisław Mikołajczyk devient vice-premier ministre.
Staline peut soutenir à Potsdam en juillet 1945 qu’il a tenu ses promesses de mettre en œuvre un processus démocratique en Pologne, posture d’autant plus facile à tenir que dans le même temps, en Hongrie et en Tchécoslovaquie, de véritables institutions démocratiques se mettent en place.
Des élections truquées se déroulent le 19 janvier 1947, donnant 80 % des voix aux communistes et Boleslaw Bierut devient Président de la République de Pologne le 5 février 1947. Sous sa direction, la faction stalinienne du Parti communiste prend progressivement le contrôle des institutions. Fin 1948, le Parti Ouvrier Unifié Polonais (POUP) est créé par fusion du PC et du parti Socialiste, et Gomulka est écarté par Boleslaw Bierut qui en devient Secrétaire Général tout en gardant ses fonctions de Président de la République.
Tchécoslovaquie
En Tchécoslovaquie, la continuité démocratique joue, puisque Edvard Beneš ancien Président de la république, homme d’état de stature internationale, de tendance sociale-libérale, proclame la Troisième république, redevient président et forme le Front National qui rassemble six partis démocratiques dans le but de constituer un gouvernement. celui-ci est mis en place dès avril 1945 avec Zdeněk Fierlinger, socialiste proche des communistes, comme Premier Ministre et Klement Gottwald, qui préside le Parti communiste, en tant que Vice-premier Ministre. L’élimination des opposants politiques sous couvert de collaboration avec les Nazis s’organise tout de suite.
Cependant le régime conserve une véritable pluralité politique et des élections sont organisées le 26 mai 1946. Elles sont remportées par le Parti communiste qui obtient 38,1 % des voix à lui seul 13et donnent une large majorité aux quatre partis de gauche qui détiennent 206 sièges sur 300. Gottwald devient Premier ministre mais maintient officiellement une ligne démocratique et nationaliste. Cette relative autonomie vis à vis de Moscou se traduit notamment par la décision des tchèques de se rendre à la conférence organisée en juillet 1947 à Paris pour lancer le Plan Marshall ; au dernier moment, à la demande expresse de Staline, ils renonceront à s’y rendre, s’alignant sur la position de tous les pays du bloc de l’Est en formation.
Notes
↑ Parmi lesquels République populaire de Chine, République démocratique du Viêt Nam, République démocratique de Corée, Cuba, République populaire d’Angola
↑ Soulet 2006, p. 16-23
↑ Soulet 2006, p. 51-56
↑ Leffler et Westad 2010 Volume 1, p. 175
↑ Leffler et Westad 2010 Volume 1, p. 175-176
↑ Soulet 2006, p. 63-67
↑ François Fejtö, Histoire des démocraties populaires, tome 1 : l’ère de Staline, Seuil, 1952, pages 48-75, 94-95, 102-103, 289-290
↑ Jean-François Soulet, Histoire comparée des États communistes de 1945 à nos jours, Armand Colin, 1996, pages 28-31
↑ Leffler et Westad 2010 Volume 1, p. 177
↑ Fejtö 1979 Tome 1, p. 189-197
↑ Soutou 2010, p. 254-259
↑ (fr) Protocole des travaux de la Conférence de Yalta (11 février 1945) [archive] sur CVCE – Centre Virtuel de la Connaissance sur l’Europe Site de référence [archive]
↑ Les communistes sont organisés en deux partis, le PC Tchécoslovaque (KSS) et le PC slovaque (KSS) qui eurent respectivement 31,2 % et 6,9 % des voix lors de ces élections
Dès lors, Gottwald aura pour objectif d’achever la conquète du pouvoir. L’occasion se présentera en février 1948 avec la démission des ministres non communistes qui s’achèvera en coup d’état des communistes connu sous le nom de Coup de Prague. Une nouvelle constitution est promulguée le 9 mai 1948. Des élections contrôlées sont organisées le 30 mai 1948, qui donnent 90 % des voix au PC et à ses alliés. Le parti communiste (KSS) et le parti socialiste (CSDP) fusionnent en juin 1948.
Hongrie
En Hongrie, un gouvernement intérimaire formé de représentas de plusieurs partis dont le parti communiste est mis en place le 21 novembre 1944, dont un militaire le Général Béla Miklós est nommé Premier ministre. Le 4 novembre 1945, les élections législatives libres sont remportées par le Parti des petits Propriétaires Indépendants qui obtient 57 % des voix. En troisième position derrière le Parti Social Démocrate Hongrois, le Parti communiste hongrois, réorganisé par Mátyás Rákosi, ne remporte que 17 % des suffrages. Zoltán Tildy, chef du parti agrarien, prend en novembre la tête d’un gouvernement de coalition. Le 1er février 1946, le Royaume de Hongrie est officiellement aboli, laissant place à la nouvelle République de Hongrie. Zoltán Tildy devient président de la République, tandis que Ferenc Nagy le remplace à la tête du gouvernement.
Cependant, le maréchal soviétique Kliment Vorochilov impose, en mars 1946, la présence des communistes au gouvernement : László Rajk devient ministre de l’intérieur et organise la police secrète Államvédelmi Hatóság (AVH). L’ancienne classe politique hongroise est victime de purges : des responsables politiques comme l’ancien chef du gouvernement István Bethlen, sont déportés en URSS, puis exécutés. Le 31 mai 1947, Ferenc Nagy est contraint à la démission par les Soviétiques. Lajos Dinnyés, membre du parti agrarien, le remplace à la tête du gouvernement, mais est contraint d’appliquer les politiques de nationalisations préconisées par les communistes. Les mines et les industries lourdes sont nationalisées, suivies des banques, puis de toutes les entreprises de plus de cent salariés. Mátyás Rákosi, secrétaire général du Parti communiste hongrois, élimine progressivement tous les adversaires politiques des communistes en suscitant scissions et fusions parmi les partis adverses ou en évinçant personnellement les politiciens rivaux.
Aux élections du 31 août 1947, malgré les pressions, la division de l’opposition et la manipulation du système électoral, les communistes ne réalisent qu’une progression relativement modeste (22 % contre 17 % aux précédentes élections). Le Parti Agrarien réussit à former une coalition avec d’autres partis non communistes et Lajos Dinnyés demeure Premier ministre, même si son pouvoir est de plus en plus affaibli par l’infiltration des partis de coalition par de plus en plus de sympathisants communistes.
A l’automne 1947, le contexte international change : la constitution du Kominform donne le signal de l’accélération de la soviétisation de l’Europe de l’Est. Le parti agrarien, puis le parti social-démocrate, sont contraints à fusionner avec le Parti communiste hongrois, qui devient le Parti des travailleurs hongrois. Le 31 juillet 1948, Tildy démissionne, remplacé à la présidence de la République par le communiste Árpád Szakasits. Le 6 février 1949, le Cardinal József Mindszenty, chef spirituel de l’église Catholique et opposant au communisme est condamné à la prison à vie pour trahison. Aux élections du 15 mai 1949 est présentée une liste unique, qui obtient 95,6 % des suffrages. Le 18 août 1949, l’assemblée adopte une nouvelle constitution. Le 20 août, la République populaire de Hongrie est proclamée.
La diplomatie en échec, les actions de l’Ouest pour contrer l’avancée communiste
La conférence de Potsdam de l’été 1945 avait fixé un cadre diplomatique de négociation des traités de paix avec les pays vaincus de la Seconde Guerre mondiale et d’occupation de l’Allemagne. Il en est résulté une activité diplomatique intense dont les tournants ont été l’impossibilité de trouver un terrain d’entente sur l’Allemagne et la décision des Soviétiques de ne pas participer à la conférence fondatrice du plan Marshall en juin 1947. Dès le printemps 1945, Churchill et Truman, qui remplace Roosevelt décédé le 12 avril, s’inquiètent des conséquences de l’occupation militaire soviétique. La décision prise le 11 mai 1945 de suspendre les livraisons effectuées aux soviétiques au titre du Prêt-Bail donnent à penser aux russes que les américains veulent peser économiquement sur eux afin d’obtenir des concessions politiques en Europe.
Les anglais et les américains ont aussi leur vision sur ce que doit être leur zone d’influence en Europe. La Grêce et la Turquie en font partie et Staline n’insistera pas dès qu’il constatera en 1945-1946 la détermination des anglo-américains à ne pas lui en laisser prendre le contrôle.
À partir de la mi-1947, la rupture est consacrée entre l’Ouest et l’Est. L’Ouest prend des initiatives majeures qui montrent sa volonté de ne pas laisser se développer le communisme en Europe occidentale et dans leurs zones d’occupation de l’Allemagne :
L’exclusion en mai 1947 des ministres communistes des gouvernements français et italiens marque la fin des larges coalitions instaurées à la fin de la guerre, semblables à celles mises en place dans les pays de l’Est,
La fusion des zones américaines et britanniques d’occupation en Allemagne (bizone) opérée dès 1947 est élargie en 1948 à la zone française pour former la trizone, où une monnaie propre à cet ensemble, le Deutsche Mark, y est introduite,
Et faisant suite à plusieurs alliances militaires conclues depuis 1945, le Pacte Atlantique est signé par les États-Unis et la plupart des pays d’Europe de l’Ouest.
Staline ne s’embarrasse alors plus de sauver les apparences de la diplomatie et de la démocratie, il va alors imposer, brutalement lorsque ce sera nécessaire, le pouvoir communiste dans tous les pays du bloc de l’Est.
à suivre ..