Guerre froide partie4
suite : Europe de l’Ouest et zone d’influence des États-Unis
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Il était toutefois assorti de deux conditions : d’une part, l’aide américaine serait gérée par des institutions européennes communes, et d’autre part, le gouvernement fédéral américain aurait un droit de regard sur sa répartition. Staline hésita, puis, fin juin, fit part de son refus. La Pologne et la Tchécoslovaquie, qui, dans un premier temps, avaient donné une réponse favorable à la proposition américaine, se virent obligées de la refuser à leur tour. Finalement, seize pays, rejoints en 1949 par l’Allemagne de l’Ouest (RFA), acceptèrent le plan Marshall : la France et le Royaume-Uni – qui en seront les principaux bénéficiaires – l’Autriche, le Benelux, la Grèce, l’Irlande, l’Islande, l’Italie, les pays scandinaves, le Portugal, la Suisse et la Turquie. En avril 1948, ces seize pays fondèrent l’Organisation européenne de coopération économique (OECE), qui deviendra plus tard (en 1960) l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), organisme supranational dont la fonction première était de gérer et de répartir l’aide américaine entre les pays membres. De 1948 à 1952, plus de treize milliards de dollars US – 5/6 sous forme de dons, 1/6 sous forme de prêts – furent fournis par les États-Unis. Cette aide à la reconstruction se composait d’une partie financière (subventions et prêts) et d’une partie en produits et équipements divers (denrées alimentaires, tracteurs, outils de production, etc.). Dans un espace économique « dollarisé » par les accords de Bretton Woods, le plan Marshall fut conçu pour combler le « dollar gap », permettant ainsi aux Européens d’acheter aux États-Unis approvisionnements et équipements tout en assurant un débouché aux produits américains. En effet, en 1946, 42 % des exportations américaines ayant pris le chemin de l’Europe occidentale, un effondrement économique de l’Europe se serait répercuté sur l’économie américaine elle-même20. L’objectif du plan Marshall, toutefois, n’était pas uniquement économique. Le gouvernement fédéral américain à Washington avait compris que la détresse des populations européennes faisait le jeu des partis marxistes alignés sur Moscou. En France et en Italie notamment, plus d’un quart de l’électorat votait communiste. Dès lors, l’injection de capitaux américains était le complément économique de la doctrine du containment : endiguer l’influence soviétique par la création d’un espace de prospérité en Europe.
Militairement : les États-Unis et leurs alliés créent un important réseau d’alliances défensives : l’Organisation des États américains (1948), le traité de Bruxelles (1948), le Pacte atlantique (1949) doté en 1950 d’une structure militaire, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) (avec mise en place des cellules paramilitaires clandestines du stay-behind, Gladio), l’ANZUS (1951), l’Organisation du traité de l’Asie du Sud-Est (OTASE) (1954) et le pacte de Bagdad (1955). Les pays signataires s’engagent à s’aider mutuellement en cas d’agression. En 1947, les services de renseignements des États-Unis, du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande signent l’accord UKUSA, dans le cadre duquel le système de renseignement d’origine électromagnétique Echelon sera mis en place dans les années 196021 (dès 1945, la National Security Agency intercepte les télégrammes, débutant l’opération Shamrock22). Une base de renseignement d’origine électromagnétique (SIGINT) est installée à San Vito dei Normanni en 1964, tandis que le premier satellite COMINT (CANYON) est lancé en août 1968, suivi de sept autres entre 1968 et 1977 23.
Europe de l’Est et zone d’influence de l’Union soviétique
Voir Bloc de l’Est.
Alliances économiques
L’URSS adopte une stratégie strictement parallèle. Elle réagit :
Politiquement : en octobre 1947, en réponse à la doctrine Truman et au plan Marshall, qui d’après les Soviétiques vise « à l’asservissement économique et politique de l’Europe », lors de la conférence fondatrice du Kominform, Andreï Jdanov, secrétaire du Parti communiste de l’Union soviétique (PCUS), réuni avec les délégués des neuf partis communistes européens, dénonça l’« impérialisme américain » qui vassalisait les économies européennes en les plaçant sous la tutelle de Washington. Le but officiel de cet organisme est « l’échange des expériences et la coordination de l’activité des partis communistes ». Lors de cette réunion constitutive, Jdanov, dans la même perspective manichéenne que Truman, formule la doctrine soviétique en matière de politique internationale : le monde serait désormais divisé en deux camps antagonistes : d’un côté, un « camp impérialiste et anti-démocratique » dont les États-Unis serait « la principale force dirigeante » ; de l’autre, un camp « anti-impérialiste et démocratique » placé sous l’égide de Moscou.
Économiquement : en janvier 1949, suite à la création de l’OECE, l’URSS fonde le Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM, en anglais COMECON), qui est chargé de coordonner les économies des démocraties populaires et de planifier les échanges commerciaux entre elles24.
Militairement : en mai 1955, suite à l’admission de la RFA dans l’OTAN, l’URSS crée le pacte de Varsovie, qui officialise l’autorité soviétique sur les armées des démocraties populaires24.
notes:
↑ Duncan Campbell, op.cit., p. 42-45
↑ a, b et c L’affrontement des grandes puissances et la dissolution des blocs, Georges COUMES [archive]