La Wunderwaffe
retour à la Seconde Guerre Mondiale
La Wunderwaffe
L’arme ultime du Führer : des enfants fanatisés et inconscients, mobilisés au sein du Volkssturm.
La Wunderwaffe (en allemand « arme miraculeuse », de Wunder, « miracle » et Waffe, « arme » ; au pluriel, Wunderwaffen) est un terme utilisé par le ministère du Reich à l’Éducation du peuple et à la Propagande, dirigé par Joseph Goebbels, pour désigner des armes révolutionnaires censées permettre le renversement de la situation militaire catastrophique du Troisième Reich à la fin de la Seconde Guerre mondiale et assurer sa victoire ultime.
Illusions et réalités
La plupart de ces armes n’ont guère dépassé le stade de projet ou de prototype ou n’ont été utilisées que trop tard et en trop petites quantités par la Wehrmacht pour avoir eu un véritable impact sur les plans militaires et celui du déroulement des opérations.
L’ambition nazie ne connaissant plus de limites — desservies par des compétences techniques largement insuffisantes pour ses ambitions — l’on vit se multiplier sous la férule d’Adolf Hitler tout autant des projets d’une grande audace scientifique que les projets les plus farfelus relevant plus de la science-fiction que de la raison, tels les super-V2 gigognes, le projet de bombardier stratosphérique Arado Ar E-555 capable en théorie de frapper la côte Est des États-Unis en emportant une éventuelle bombe atomique, les rayons de la mort, « découverts » par Robert Ley en avril 1945 et dont une enquête diligentée par les services de Speer démontre le caractère d’excentricité1 ou celui plus extraordinaire encore de bombardier sub-orbital Silbervogel développé sur papier par l’ingénieur Eugen Sänger 2.
À partir de 1944, avec la dégradation de la situation militaire, les armes miracles sont abondamment utilisées par la propagande, qui réalise des films pour les actualités filmées3 ou des reportages pour la presse écrite, évoquant les dégâts de ces armes sur les villes britanniques4; pendant l’automne et l’hiver 1944-1945, la population adhère diversement au discours sur ces nouvelles armées, et la présence de ces armes est encore certifiée par des courriers en mars 1945 : pour les convaincus, la guerre est alors vue comme une course contre la montre, pour parvenir à achever ces nouveaux équipements, mais, ceux-là même commencent à être déçus dans leur espoir au fil du mois de mars5 ; les responsables du parti eux-mêmes semblent convaincus de l’efficacité de ces armes et de leur capacité à renverser le cours de la guerre6 ; pour les sceptiques, de plus en plus nombreux au fil du conflit, ces armes sont objet de plaisanteries : Les V1 sont appelés Volksverdummer Nr 1 (abêtisseur du peuple n°1) ou encore Versager Nr 1 (perdant n°1)7.
Mais si leur développement tardif n’a pas eu de réelle influence sur l’issue du conflit, ces armes ont suscité après la chute du Troisième Reich l’intérêt de plusieurs des pays vainqueurs. La récupération des avancées technologiques importantes mises au point par le complexe militaro-industriel allemand a notamment pris la forme de programmes structurés menés par les services secrets de nations telles que Opération Paperclip (États-Unis), Département 7 (URSS), T-Force (en) (Royaume-Uni) ou la France.
La capture du centre d’essai de Peenemünde par les Soviétiques, des archives allemandes relatives au programme de missiles tactiques et balistiques du programme Vergeltungswaffen (V-Waffen) et surtout de l’équipe de savants et techniciens de Werner von Braun par l’intermédiaire de Paperclip ont ainsi permis le développement des missiles balistiques US et surtout du programme spatial de la Nasa.
Si la plupart des projets et spéculations paraîtraient irréalistes dans le contexte d’une Allemagne réduite à un champ de ruines par l’issue du conflit, reflet que donnait Berlin le 8 mai 1945, les réalisations récentes des ingénieurs allemands qui avaient dépassé le stade du prototype, tel l’avion Messerschmitt Me 163 Komet, semblaient donner crédit aux envolées lyriques du Dr Goebbels sur la contribution des Wunderwaffen à l’issue de la guerre — les interventions de ce dernier à la radio allemande, destinées à galvaniser une population réduite à vivre sous les abrisnote 1, s’éloignaient de plus en plus de considérations concrètes, à mesure que les chars adverses achevaient la conquête du territoire.
De sorte que la frontière est floue entre les modèles effectivement produits industriellement et les Wunderwaffen théoriques ou prototypiques, et seule la situation arrêtée lors de la reddition les sépare.
Le Panzer VIII Maus (« souris ») du musée de Kubinka.
Projet de missile antiaérien Wasserfalle
Guerre terrestre
Fliegerfaust
Tellermine 29
Panzerkampfwagen VIII Maus.
Le Maus (« souris » en allemand) est un char allemand de la Seconde Guerre mondiale. Il est le char le plus lourd jamais développé jusqu’au stade de prototype, état où il est resté.
Le projet fut mené par Ferdinand Porsche et présenté à Hitler en juin 1942. Le premier prototype fut prêt en 1943 sous le nom de « Mammut » puis devint finalement « Maus » en février 1943, avant que le projet ne soit abandonné.
L’équipage était constitué de 6 hommes : un conducteur et un opérateur radio situés dans la caisse ; le chef de char, le canonnier ainsi que les deux chargeurs situés dans la tourelle.
Le blindage de la partie frontale du char présentait une inclinaison de 35 % par rapport à la verticale. Le blindage de la caisse était de 180 mm à l’avant et 160 mm à l’arrière. Celui de la tourelle était de 240 mm à l’avant, 200 mm à l’arrière et 60 mm sur le toit.
Son moteur permettait une vitesse maximale de seulement 13 km/h. Il était doté d’une autonomie sur route de 160 km et de 62 km en tout-terrain. La consommation de carburant était de 3 000 à 4 000 litres pour 100 km
Une commande de 150 à 200 exemplaires fut passée mais aucun n’entra en service actif avant la fin de la guerre. Seuls deux exemplaires furent construits et 9 autres étaient en production à la fin de la guerre.
Comme pour le Tigre II, son principal problème de développement se situait dans la nécessité de trouver un moteur fiable et extrêmement puissant pour mouvoir une telle masse, ce qui explique sa faible vitesse de déplacement. Un autre problème était d’ordre logistique : avec ce poids, peu de ponts lui seraient ouverts, limitant ainsi ses actions ; on prévoyait de lui ajouter, comme pour les sous-marins ou les premiers exemplaires du Tiger I, des schnorkels afin de franchir des rivières en immersion.
Ces problèmes auraient réduit au minimum ses fonctions offensives mais en revanche auraient pu faire de lui un engin meurtrier en défense de zone vitale, lorsque bien sûr l’aviation ne pouvait pas agir car avec sa faible mobilité il aurait offert une cible de choix aux avions d’attaques au sol.
On peut observer un de ces chars d’assaut au musée des blindés de Kubinka en Russie.
Développement du Panzerkampfwagen VIII Maus.
Les plans du char avaient été réalisés en été 1943, avec une production prévue de 5 par mois, le châssis, la tourelle et l’armement étant fabriqués par Krupp Ag et le reste par Alkett qui était en plus responsable de l’assemblage final.
Le choix de l’armement principal définitif fut pris en janvier 1943 après une hésitation entre différents canons. Ces changements firent passer la masse de 100 tonnes à celle, énorme, de 188 tonnes. En mai 1943, une maquette en bois à l’échelle 1 fut présentée à Hitler, qui approuva et lança la pré-commande de 150 exemplaires. Il revint sur cette décision en octobre 1943 et le développement fut entièrement stoppé. Néanmoins, les recherches continuèrent sur le Maus et en décembre 1943 un modèle (avec une fausse tourelle) de la masse de 188 tonnes fut testé. Sa faible vitesse ainsi que des trains des roulements fragiles furent constatés.
En mars 1944 le second prototype fut achevé, ce fut une version nettement améliorée du précédent mais celui-ci ne reçut sa première tourelle opérationnelle que dans les mois qui suivirent.
En août 1944 Krupp dut totalement arrêter sa participation dans le projet, ce qui n’empêcha pas le prototype 2 d’effectuer ses premiers essais complets.
- Armement individuel
- Supertanks et monstres blindés : les E-serien (Entwicklung : litt. développement)8.
- La « série E » fut à l’origine lancée par Heinrich Ernst Kniekamp dès 1942. Le projet global visait à remplacer les chars et chasseurs de chars (jagdpanzern) alors en service. Ce programme fut accepté par Hitler en 1943, l’ensemble des 6 engins prévus dans le projet utilisant des piéces standardisées afin d’en faciliter la production et la maintenance — souci récurrent et priorité absolue du ministre de l’économie Albert Speer. Le programme « vivota » jusqu’en 1944 c’est-à-dire jusqu’au moment où il devint évident que l’économie allemande en ruine ne pourrait jamais donner suite à ces extraordinaires projets. Le plus « achevé » de ces monstres fut l’E-100 Maus (souris)9, doté d’un canon de 150 mm, comparable à ceux du Bismarck10. Quelques exemplaires ont été capturés par les Britanniques à l’état d’éléments non-assemblés lors de leur progression dans le Nord-ouest et le Nord de l’Allemagne pendant l’opération Varsity entre autres.
Mais le plus improbable de ces programmes de super-blindés est le Landkreuzer Projekt datant de 1942.
- Flakpanzern Coelian et Kugelblitz
- Panzer VI Panther F Schmallturm
Projet de chasseur de char Vk3001 armé d’un canon de 128 mm
Guerre aérienne : la défense du Reich et l’ Amerika Bomber
- L’interception à haute altitude: missiles et chasseurs.
- Un Volkssturm aérien. (s’agissant vraisemblablement d’un terme de propagande)
Amerika Bomber
Bien qu’ayant d’emblée opté pour une doctrine militaire résolument offensive, les autorités militaires allemandes — à l’inverse de ce qui se fit en Grande-Bretagne et aux États-Unis — n’accordèrent qu’une attention toute relative aux projets de bombardiers stratégiques à long rayon d’actionnote 2, favorisant plutôt ceux à moyen rayon — Heinkel He 111, Junkers Ju 88 et variantes ou Dornier Do 17 et variantes — opérant à partir des bases excentriques du Reich et des aérodromes des pays occupés. Le premier appareil « long rayon » mis en service fut en fait une avion de ligne civil militarisé, le Focke-Wulf Fw 200 Condor, affecté à des missions maritimes lointaines. Son successeur désigné, le Heinkel He 177 Greif (Griffon), affligé de vices cachés et de problèmes techniques récurrents et endémiques, ne connut qu’une carrière discrète, sa propension fatale à s’enflammer lui ayant valu le sobriquet de « fliegende Feuerzeug », le briquet volant, et les quelques rares raids sur Londres — missions Steinbock — auxquels il prit part relevant quasiment de la péripétie.

Bien que deux prototypes aient été construits dès 1942, l’ambitieux et remarquable quadrimoteur Messerschmitt Me 264 — l’authentique Amerika Bomber — n’entra jamais en production, les deux exemplaires existants étant réservés pour une éventuelle fuite de Hitler au Japon. Les projets Junkers et Dornier restèrent également au stade expérimental de prototypes et de bancs d’essai de systèmes d’armes et autre ingénierie aéronautique.
Les développements heureux de la propulsion à réaction allemande et la vindicte exaspérée de Hitler, bien décidé à frapper Londres, Moscou et New Yorknote 3 relancèrent, mais bien trop tardivement, ces projets, Joseph Goebbels promettant aux Américains — mais surtout au peuple allemand — un nouveau Blitz digne de celui qui frappa Londres en 1940, en représailles aux bombardements des villes allemandes.
Ce soudain regain d’intérêt des dirigeants politiques du Reich pour le bombardement stratégique permit dès lors un développement poussé du programme Arado Ar 234 Blitz (programme pourtant lancé dès 1941), les premiers appareils montant en ligne lors de l’offensive des Ardennes fin 1944. Sa vitesse de Mach 0,8, son plafond de 10 000 m et son rayon d’action de 1 500 km devaient lui permettre en théorie de bombarder Londres impunément. Dans la réalité, son rôle se réduisit essentiellement à vainement tenter d’enrayer le progression alliée à l’Ouest par des bombardements défensifs, le plus célèbre d’entre-eux étant celui contre le pont de Remagen en mars 1945. À l’approche de la fin des hostilités, neuf appareils basés dans le nord de l’Allemagne tentèrent encore quelques raids tout à fait symboliques et à seule fin de propagande contre Londres.
Parallèlement, d’autres projets dormant depuis le début de la guerre furent relancés dans l’intention bien vaine de donner corps à cette propagande vantant une prochaine victoire grâce aux Wunderwaffen. C’est ainsi que les progammes Junkers (Junkers Ju 388, Junkers Ju 488) ou Dornier 317 connurent un semblant de relance tout aussi illusoire que tardive.
Mais le plus extraordinaire resta sans conteste le projet de bombardier stratosphérique Arado Ar-E 555 qui en théorie aurait dû franchir l’Atlantique, bombarder les États-Unis tout en les traversant et atterrir au Japon pour se réapprovisionner, en faisant ensuite le voyage de retour par dessus l’URSS à très haute altitude, hors de portée des faucons de Staline !
Autre vue du prototype Me 264 en vol
Guerre navale : missiles et sous-marins de poche
- Unterseeboot type XXI
- Unterseeboot type XXVI
Missiles balistiques … et bombe nucléaire
- missile V2.
- canon V3.
- fusée V4.
Des Wunderwaffen aux expédients : le « Crépuscule des Dieux »
Le 25 juillet 1944, à peine remis des séquelles de l’attentat du 20 et se méfiant de plus en plus de l’armée, Hitler décréta la « guerre totale » et en septembre mobilisa le « Deutscher Volkssturm », milice populaire chargée de la défense du Vaterland. Les Wunderwaffen promises ne voyant bien sûr pas le jour, cette milice se retrouva équipée de bric et de broc. Des armes prises en 1938 en Tchécoslovaquie ou de vieux fusils hollandais saisis en 1940, des casques italiens pris en 1943 et des mitrailleuses MG15 démontées de bombardiers inutiles furent ainsi distribués à ces soldats improvisés11. On vit même ressortir des arsenaux de vieilles Maxim 08/15 de la Première Guerre mondiale, pourtant retirées de première ligne après la campagne de mai 1940 en raison de leur encombrement excessif, d’anciens combattants de la Première Guerre mondiale assurant l’instruction d’arme de leurs concitoyens, de même d’ailleurs que le vieux Stahlhelm M1916. À cause du manque cruel de moyens antichars mobiles, les Panzerjäger — chasseurs de chars — furent équipés de bicyclettes « spéciales » robustes et rudimentaires et conçues pour le transport de plusieurs Panzerfausts. Des canons ATK de 75 ou 88 mm furent sommairement montés sur des châssis chenillés dépourvus de toute protection pour les servants de la pièce (Waffenträger), les fabuleux tueurs de chars équipés de canon de 128 mm lourd ne dépassant pas quant à eux la planche à dessin ou le modèle en bois. Des armes individuelles « basiques » en tôles embouties de fabrication de masse aisée mais de fiabilité douteuse furent aussi distribuées — dont une copie de la Sten britannique fabriquée par Erma. Ce pitoyable arsenal digne d’un musée n’empêcha cependant pas les Volkssturmmänner de se battre avec détermination sur le front de l’est et à Berlin.
MP3008 copie allemande de la Sten
Mitrailleuse de bord de bombardier reconvertie en fusil-mitrailleur
Wunderwaffe et science-fiction uchronique
Les Wunderwaffen ont inspiré, depuis la fin de Seconde Guerre mondiale, de nombreux scénarios uchroniques mettant en scène des machines diaboliques tirées d’expérimentations scientifiques nazies.
Ce thème a notamment fait l’objet d’un sous-genre du cinéma italien des années soixante, la nazisploitation. Dans les années quatre-vingt, la série de films Indiana Jones dépeint également des Nazis à la recherche d’armes miraculeuses. On le retrouve aujourd’hui toujours au cinéma (Iron Sky, 2012), mais également dans le jeu vidéo ou la bande dessinée — par exemple Je suis légion (2004-2007), Block 109 (2010-) ou Wunderwaffen (2012-), qui met en scène le Lippisch P13a, intercepteur stato-fusée.
Projet d’aile volante Horten Ho XIIIB.