Le matériel capturé par les Italiens en Afrique du Nord
retour à la Seconde Guerre Mondiale
Le matériel capturé par les Italiens en Afrique du Nord
Cette photo de 1942 est un bel exemple de la diversité des véhicules utilisés au sein des unités italiennes en Afrique du Nord :
deux AB41 cotoient une automitrailleuse Humber Mk II et un Bren Carrier.
(crédits photo : collection Majno)
Au cours de 35 mois de combats entre la Libye, l’Egypte et la Tunisie, l’armée italienne eu l’occasion de récupérer et de réemployer à son compte de nombreux véhicules et armements des britanniques et de leurs alliés. Ce matériel fut la plupart du temps intégrer sur le champ aux unités de premières lignes, qui étaient en conséquence équipées d’une grande variété de véhicules. Parfois, des unités entières n’étaient équipées que de matériel de prise. La nationalité n’étant donc plus qu’une question de matériel, il fallut adopter des signes distinctifs clairs pour limiter au maximum le « friendly fire ».
Au fil de cet article, vous découvrirez une liste non exhaustive des matériels alliés réutilisés par le Regio Esercito en Afrique du Nord. Malheureusement, une liste complète est difficile voire impossible à établir étant donné la variété du matériel et le fait qu’il soit non réglementaire. J’espère cependant susciter l’intérêt des amoureux des combats nord-africains qui auront à coeur de creuser davantage cette entrée en matière ainsi que les maquettistes qui prendront certainement plaisir à représenter ces véhicules sous des marquages atypiques.
Les chars et autres blindés chenillés
Commençons par les chars légers. Deux Mark VI B furent capturés et réutilisé par les Italiens : immatriculés FMX 863 et WD 17216 par leurs anciens propriétaires, ils reçurent ensuite les immatriculations RE 5601 et RE 5602. Ce dernier était incorporé au 8° battaglione Mitraglieri Autocarrato du VIII° Corpo d’Armata en date du 11 mai 1942.
Observez les trois photos ci-dessus : Cruiser A9 en charge au sein du LXII° Battaglione Carri. Remarquez les bandes tricolores peintes sur la tourelle
Le Cruiser A10 immatriculé T9250 tomba aussi entre les mains des Italiens, qui le réimmatriculèrent RE5149 le 27 août 1941 et l’envoyèrent au CSM (Centro Studi Motorizzazione) avant de l’assigner au dépôt du régiment de parachutistes de Viterbo le 15 janvier 1942. Le CSM reçu également le Cruiser A13 Mk II immatriculé RE 5137 et le Mk VI Crusader T43652 réimmatriculé RE 6444 le 28 mars 1942. De nombreux autres A13 furent capturés par les Italiens : le Mk II RE 7033 immatriculé le 31 mai 1943 et envoyé au Centro Addestramento Carristi de Cordenons, le Mk II RE 5134 et les Cruiser Mk IVA RE 5138, 5139, 5140, 5141, 5142, 5143 et 5144 tous immatriculés le 21 juin 1941.
De nombreux exemplaires des chenillettes de transport Bren Carrier et Universal Carrier furent capturés, dont trois (les RE5047, 5143 et 5144) envoyés ensuite en Italie au CSM et à Ansaldo qui s’en inspira pour réaliser la Cingoletta CVB5 (ou Cingoletta Ansaldo L6).
(crédits photo : Istituto Luce)
Les automitrailleuses et autres véhicules blindés
Dès les premiers mois de guerre, les troupes italiennes capturèrent des automitrailleuses du type Morris CS9 et Rolls-Royce. La prise la plus célèbre fut sans doute celle du 21 juin 1940, lorsque le trimoteur SM79 du Maréchal Italo Balbo parvint à capturer une MLAC (Morris Light Armored Car, ou encore Morris CS9) du 11th Hussard à Bir El Gobi. Cette automitrailleuse fut vraisemblablement utilisée ensuite par la 4ème division CCNN (Camicie Nere). Deux RRLAC (Rolls-Royce Light Armored Car) furent prises aux Anglais par le I° battaglione carri M en décembre 1940 lors de son repli sur Tobrouk. Lors de la défense de l’aérodrome de Maturba en janvier 1941, deux MLAC furent vraisemblablement utilisées par les Italiens.
(crédist photo : USSME)
Morris CS9 peinte aux couleurs de la 4ème division CCNN opérant à Sidi Barrani.
(crédist photo : USSME)
Rolls-Royce Light Armored Car aux couleurs italiennes.
Les Italiens capturèrent également des Daimler Mk II Dingo de reconnaissance. On peut notamment citer l’exemplaire réimmatriculé le 7 juillet 1941 RE 724B et assigné au Corpo d’Armata di Manovra le 20 octobre 1941. La division motorisée Trieste en avait une aussi durant l’été 1942.
Les Marmon Herrington Mk II et III connurent aussi du service dans le Regio Esercito. Les Anglais avaient pris l’habitude de remplacer le fusil antichar Boys d’origine par un Solothurn, un Breda 20/65, un Hotchkiss de 25 mm ou même un canon de 47/32. La présence de ces armements sur les Marmon ne signifie donc pas qu’elles avaient changés de propriétaire. Néanmoins, les italiens en utilisèrent, comme l’exemplaire immatriculé RE 723B le 27 août 1941, qui fut rattaché à l’Autodrappello del Comando Superiore Forze Armate Africa Settentrionale.
Rencontrée sur le champ de bataille nord-africain à partir du printemps 1942, l’automitrailleuse Humber Mk II fut elle aussi réutilisée par les Italiens. Malheureusement, je ne sais pas quelle unité en fut dotée.
Les véhicules non blindés
Les Italiens firent également bon usage des véhicules de soutient capturés, en les réemployant dans leur configuration d’origine ou bien en les transformant en batterie volanti. La production de ces pièces d’artillerie autoportées commença à l’été 1941 dans les ateliers du 12° Autoraggrupamento, dans le village de Giovanni Berta non loin d’El Gubba.
Outre ses réalisations sur Lancia 3Ro, cette unité transforma des véhicules de prise d’origine canadienne Ford F15A à traction intégrale en les dotant de canons-mitrailleurs Breda de 20/65 sur affût mod.39 de position ainsi que des camions anglais Morris CS6 sur lesquels furent installés des canons de 65/17. Les ateliers de Giovanni Berta produisirent deux batteries de Ford F15A (soit 8 pièces) et 7 batteries d’autocannoni da 65/17 (pour 28 exemplaires). Ces batteries furent toutes assignées au RECAM (Raggruppamento Esplorante del Corpo d’Armata di Manovra) à partir d’août 1941. La moitié des autocannoni da 65/17 furent détruits par erreur par des Stuka allemands alors qu’ils attaquaient le dépôt britannique de Bir Birraneb le 1er décembre 1941.
Malgré cette perte, les résultats obtenus notamment à Sidi Rezegh et Bir El Gobi furent jugés satisfaisants, et la production se poursuivit jusqu’à la dissolution du 12° Autoraggruppamento en juin 1942. Entre temps, deux groupes d’autocannoni da 65/17 purent voir le jour (les XIV° et XV° gruppi), ainsi que la 13a batteria de 20 mm. Ces unités furent rattachées au régiment d’artillerie de la division Giovani Fascisti en mai 1942.
Ford F15A armés d’un Breda 20/65 sur affût de position mod.39.
Après l’arrêt de la production à Giovanni Berta, le matériel réutilisé par les troupes italiennes fut des plus variés, les modifications étant réalisées directement au sein des unités de première ligne. Ainsi, le nucleo esplorante divisionale de la division motoriése Trieste se composait à l’été 1942 d’un large panel de véhicules, dont de nombreuses camionnettes capturées et armées de canons antichars italiens, anglais ou polonais.
(crédits photo : Istituto Luce)
L’artillerie
En Afrique du Nord, les artilleurs italiens réutilisèrent fréquemment les canons de 25 livres (25 pdr) britanniques, qualifiés de cannoni da 88/27 PB (pour Preda Bellica) par leurs nouveaux propriétaires. Leur portée, dépassant les 12 km, était très appréciée pour les tirs de contrebatterie. Suivent quelques chiffres qui donnent un aperçu de la quantité de matériel capturé.
De fin mai à juillet 1942, la division motorisée Trento récupéra 12 canons de 25 livres et forma le nombre adéquat d’artilleurs pour les servir. En septembre 1942, l’atelier de réparation des pièces d’artillerie de Tobrouk comptait 20 canons de 25 livres avec une importante quantité de munitions. Quelques batteries capturées lors de l’offensive de mai-juin 1942 restèrent en service dans l’armée italienne jusqu’à El Alamein et même jusqu’à la campagne de Tunisie pour certaines.
Dans le domaine des canons antichars, les Italiens réutilisèrent surtout les canons de 2 et 6 livres (respectivement 40 et 57 mm), des Bofors de 37 mm et des M3 américains du même calibre. Des Bofors antiaériens de 40 mm furent également employés dans le rôle antichar comme antiaérien.
En Tunisie, l’armée italienne récupéra quelques canons antiaériens français de 75/51 mod.32 et de 75/34 mod.97 aux forces de Vichy. Le mod.97 n’était plus très efficace en 1943 vu son grand âge, mais le mod.32 affichait des performances similaires à celles du 75/46 italien, avec une cadence de tir bien plus élevée (25 coups/minute contre 15 pour son homologue transalpin).